Pourquoi les enfants aiment-ils les histoires qui font peur ?

Chapô

Sorcières maléfiques, loups affamés, ogres ou chasseurs cruels sont autant de figures terrifiantes que l’on trouve de manière systématique dans les contes pour enfants, les frères Grimm et Charles Perrault ayant placé la peur au cœur de leur œuvre. Originellement destinées aux adultes, ces histoires sont, depuis des siècles, plébiscitées par les enfants. Pourquoi les plus jeunes se projettent-ils tant dans les histoires qui font peur, au point d’en redemander ?

Dans les contes, les images poétiques et bienveillantes de la princesse, de la gentille petite fille ou des enfants innocents sont toujours menacées par les sombres desseins du méchant de l’histoire : la marâtre, le loup, l’ogre, la sorcière ou le chasseur… Le gentil petit Chaperon Rouge qui va rendre visite à sa grand-mère est surpris par le loup, Cendrillon est maltraitée par sa belle-mère, la Belle au Bois Dormant est la cible d’une sorcière jalouse… Les intrigues ont pour point commun de mettre en scène de manière tangible des peurs partagées par l’ensemble des enfants. Les peurs d’être abandonné, rejeté ou encore dévoré par une créature imaginaire sont ainsi projetées sur des personnages et des récits extérieurs qui font l’effet de catharsis, car retranscrites à voix haute dans un cadre sécurisant par un adulte de confiance (parents, grands-parents, nourrice, maîtresse…). Objet physique que l’on peut ouvrir et fermer à sa guise, le livre donne à l’enfant l’impression de pouvoir contrôler sa peur et de l’appeler à lui uniquement quand il le souhaite, le laissant ainsi dans le contrôle. C’est donc un moyen de faire face à ses peurs en s’y confrontant, quand il le souhaite et dans un cadre adapté.

Autre intérêt des contes : ils sont plein d’espoir et donnent à voir des héros qui parviennent à surmonter les obstacles auxquels ils sont confrontés. Certes, Alice se perd dans le pays des merveilles et manque de se faire trancher la tête mais elle finit par se réveiller et découvre alors que tout n’était qu’un cauchemar. Le Petit Poucet, abandonné avec ses frères en pleine forêt, semble condamné à se faire dévorer par un ogre mais sa malice lui permet de tromper l’ogre et de retrouver sa famille. Les fins heureuses permettent de surmonter les anecdotes effrayantes qui les précèdent.

Les contes offrent enfin l’opportunité de grandir et de se construire dans sa relation à soi-même et aux autres. Des chercheurs en neuroscience de l’université Emory (États-Unis) ont ainsi montré que les livres de fiction aident les enfants à développer leur empathie. La peine ou l’attachement qu’ils développent pour les personnages de fiction exerce leur cerveau à ressentir des émotions similaires envers des personnes réelles. À vos contes !

Pour aller plus loin, vous pouvez par exemple lire les écrits du psychologue américain Bruno Bettelheim parmi lesquels Psychanalyse des contes de fées (1976).

Contes
Texte

« Ce livre a été écrit pour aider les adultes, et plus spécialement ceux qui ont charge d’enfants, à comprendre l'importance des contes de fée ».